Quand le Canadien a fait l’acquisition de Mike Matheson en juillet 2022, il ne s’agissait pas seulement de larguer un défenseur mécontent en Jeff Petry, qui était plus vieux, plus coûteux et soudainement moins performant.

C’était aussi d’amener à Montréal un joueur qui, s’il était bien guidé, avait les atouts pour devenir aussi bon que ne l’avait été Petry à Montréal.

Comme avec beaucoup de joueurs, je pense qu'il y a avec Mike une progression qui vient avec la maturité du joueur de hockey, et qui vient avec un environnement propice au développement , avait commenté Kent Hughes au moment de la transaction. 

Le nouveau DG savait à qui il avait affaire. Matheson avait été son client durant sa carrière d’agent.

 Je pense que l’on connaît suffisamment bien Mike pour savoir quel est cet environnement, et je pense qu’il aura amplement de cet environnement à Montréal.

Trois ans plus tard, cet environnement s’est défini, il a été érigé en culture, et a en quelque sorte été célébré à travers les prolongations de contrat de cinq ans consenties à Hughes et son patron Jeff Gorton.

Matheson fut la première acquisition en défense de l’ère Gorton-Hughes, la première étape vers une refonte complète de la brigade défensive du Canadien. Et il est devenu un symbole du cadre de développement que la nouvelle direction voulait établir à Montréal.

Jeff Gorton et Kent Hughes ont reçu des prolongations de contrat de cinq ans, mardi. (archives)

Photo : La Presse canadienne / Christinne Muschi

Sous la nouvelle administration, Matheson a joué davantage qu’il ne l’avait jamais fait en carrière. Il a obtenu en 2023-2024 un sommet personnel de 62 points. Et il veille maintenant à polir son jeu défensif pour être plus complet qu’il ne l’était auparavant.

Dans l’incubateur de Martin St-Louis, le défenseur de 31 ans a démontré que le développement ne se limite pas aux jeunes joueurs.

Je suis vraiment content de mon niveau de jeu actuel, mais ça ne me satisfait pas pour autant , a dit Matheson, mardi soir, à propos de son excellent début de saison. 

 Je suis dans un bon état d'esprit, et je ne m’arrête pas à me demander si c'est le meilleur hockey que j'ai joué ou non. À chaque match, je me dis que tel ou tel aspect a bien été, et que tel ou tel autre aurait pu être un peu différent. Alors, je le garde à l’esprit en vue du match suivant. 

C’est le travail de son patron de maintenir une vue en altitude de la situation, mais Matheson est férocement dans l'ici et maintenant.

Il ne cherche pas à se prouver

Si Geoff Molson a renouvelé le mandat de ses deux dirigeants hockey – les ententes ont été approuvées il y a un bout de temps déjà, mais n’ont été annoncées que mardi – c’est parce que leur plan de reconstruction n’aurait pu mieux se dérouler qu’il ne le fait présentement.

Le Canadien est devenu une équipe jeune, talentueuse et bien gérée au plan salarial. Et parmi les quelques vétérans plus expérimentés qui assaisonnent la formation, plusieurs ont modifié leur façon de jouer de manière à mieux servir l’équipe.

C’est le cas de Matheson.

Il reste à savoir si, en plus de servir les succès actuels de l’équipe, il sera encore là pour ceux qu’elle aura à l’avenir.

Mike Matheson (à droite) a 31 ans, bien au-dessus de la moyenne du club qui ne dépasse pas les 26 ans.

Photo : The Canadian Press / Graham Hughes

Matheson a entamé la dernière année d’un contrat de huit ans lui rapportant 4,875 millions $ par saison. Il sera joueur autonome à la fin de la saison. Dans la foulée de tous les joueurs clé ayant obtenu des contrats à long terme, il est le prochain à devoir considérer s’il peut en venir à un accord avec le CH.

Donc on apprécie Mike Matheson, a poursuivi Gorton. Où il s’insère dans le plan, ça reste à voir, mais on voit bien qu’il a un excellent début de saison et on est ravis de ce qu'il apporte à notre défense.

La saison vient à peine de commencer, mais le fait d’avoir été jumelé au nouveau venu Noah Dobson coïncide avec l’une de ses meilleures séquences depuis qu’il est à Montréal. St-Louis a fait son éloge après la victoire face au Kraken de Seattle, mardi soir, en rappelant la quantité de terrain que Matheson est capable de couvrir en raison de son excellent coup de patin.

Quand Mike est sur la glace, j'ai toujours l'impression qu'on est correct.

Matheson assure que de vouloir convaincre ses patrons qu’il mérite un contrat à long terme avec le Canadien ne fait pas partie de ses motivations.

Ce n’est pas à cela qu’il carbure.

Ce qui me branche, a dit Matheson, c’est de faire de mon mieux pour mon équipe, et ça me donne pas mal plus d’énergie qu'une chose négative comme ça, ou du moins qui tient un peu de la confrontation, du genre "je vais vous montrer". C'est plus motivant pour moi de faire de mon mieux pour les gens dont je me soucie. On a atteint les séries éliminatoires l'année dernière, je veux y retourner et aller plus loin. C’est ça qui me donne de l'énergie.

Jeff Gorton (photo d'archives)

Photo : Radio-Canada / Ivanoh Demers

Patience dans les prochaines décisions

Les visages sont souriants autour du Canadien en ce début de saison. Le climat de travail et les résultats sont en harmonie, et Gorton et Hughes ont été plébiscités dans leurs efforts de bâtir une équipe gagnante.

Au tournoi de golf, Gorton avait parlé du fait que l’équipe pouvait désormais se permettre d’être plus sélective dans ses prochaines manoeuvres. Cela implique toute forme de transaction, bien sûr, mais cela implique aussi d’évaluer dans quelle mesure un trentenaire comme Matheson aiderait la cause du Canadien en signant un nouveau contrat. 

C’est juste d’être patient par rapport à la suite et s’assurer de ne pas faire de faux pas, a réitéré Gorton mercredi. Il y aura toujours des choses qui se présentent à nous, des dossiers déposés sur notre bureau. Il faudra les examiner attentivement et se demander si c'est la bonne chose à faire. Est-ce que cette personne va s'intégrer dans notre équipe ? Est-ce la pièce manquante dont on a besoin? Voilà les considérations à prendre en compte.

Mais être patient, c'est un mot difficile à prononcer dans notre situation. Personne ne veut vraiment l'entendre, mais c'est la vérité. Et je pense que ç'a fonctionné pour nous jusqu'à présent et on va continuer d’agir comme ça. 

Les questions d’intégration ou de pièce manquante ne s’appliquent pas à Matheson. La familiarité joue en sa faveur ici parce que l’équipe est en terrain connu avec lui.

Mais à tort ou à raison, son nom est souvent associé à celui du droitier David Reinbacher, dans la mesure où l’émergence possible du jeune Autrichien pourrait un jour doter le Canadien d’un autre défenseur de calibre top 4. Son ajout permettrait en outre à Lane Hutson de retourner du côté gauche, son côté naturel.

Un tel scénario compliquerait le statut à long terme de Matheson avec le Canadien.

Or, Reinbacher ne joue pas présentement avec le Rocket de Laval, et rien ne garantit qu’il pourra un jour faire sa marque tel qu’espéré. Et pendant ce temps-là, le Canadien profite à fond des services d’un joueur québécois qu’il aime, qui continue à s’améliorer, et dont l’organisation connaît tout l’historique.

Il serait de plus en plus téméraire de renoncer à Matheson en pensant confier son poste à Reinbacher la saison prochaine.

Gorton prône la patience afin de laisser les situations s’éclaircir. Il en va de même avec Matheson.

Mais avec tout l’historique que partagent le joueur et l’organisation, ce ne sera pas nécessaire d’attendre une saison complète avant de se faire une idée.