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Orgo-Life the new way to the future Advertising by AdpathwayAu prochain match de l’Alliance de Montréal à l’Auditorium de Verdun, vous pourrez apercevoir un partisan un peu plus engagé que les autres. Au bord du parquet, vêtu d’un maillot de l’équipe, il applaudit à chaque action électrique de ses joueurs, vibre à chaque panier marqué et vit la rencontre comme s’il s’agissait d’une finale.
Ce partisan acharné, c’est Léo Bouisson, l’un des trois copropriétaires de l’Alliance, désormais aux rênes de la franchise montréalaise. Depuis six mois, il partage la direction du club avec l’ancien joueur de la NBA Joel Anthony et l’homme d’affaires Ian-Philip Paul-Hus, sous le nom de la compagnie Alli-Oop Investissement. En entrevue exclusive avec Radio-Canada Sports, Bouisson revient sur les débuts de cette aventure et la vision qu’il défend avec ses deux acolytes pour faire grandir l’équipe dans l’écosystème montréalais.
Jeune entrepreneur de 32 ans, Bouisson porte plusieurs chapeaux, en plus d'être copropriétaire de l’équipe. En plus de ses responsabilités sportives, il est le cofondateur de Weeve, un service de location d'automobiles basé à Montréal. C’est d’ailleurs cette entreprise qui a servi de passerelle entre ses deux univers de prédilection : la technologie et le basketball.
En 2023, Weeve devient partenaire commercial de l’Alliance de Montréal. Un premier contact entre Léo et le club, qui n’a pas été motivé par des chiffres.
Du côté business, ça ne faisait aucun sens. Mais du côté personnel et passion du basketball, c’était juste une réussite personnelle de pouvoir m’associer à l’équipe, se souvient le jeune propriétaire d'origine française.
Tout s’est accéléré au début de l’année suivante. En janvier 2024, Bouisson apprend que la franchise est à vendre. Derrière cette mise en marché, la ligue elle-même, qui cherche à céder les équipes encore sous sa gouvernance à des propriétaires locaux.
L’acquisition était faite auprès de la ligue, mais l’équipe appartenait au fondateur original de la ligue, explique-t-il. J’étais avec un de mes associés de Weeve à un match et je lui ai fait une blague, lui disant "hey, ce serait vraiment drôle de faire partie du rachat".
Une boutade lancée dans les gradins qui deviendra réalité quelques semaines plus tard.
Un rêve depuis toujours
Pour Léo Bouisson, devenir propriétaire d’une équipe sportive n’a jamais été une lubie de dernière minute. L’idée l’accompagne depuis longtemps, comme un rêve bien gardé dans un coin de sa tête.
J’ai toujours eu cette idée dans ma tête. Je l’avais dit à ma blonde il y a deux ans, "un jour, j’aurais une équipe de sport".
Mais dans sa version du rêve, les choses devaient se faire plus tard. Et à plus petite échelle. Devenir actionnaire minoritaire dans une grande organisation, peut-être, mais certainement pas diriger, aussi jeune, une franchise professionnelle.
À vrai dire, je n’y croyais pas du tout au début. Je n’ai jamais vu un propriétaire d’une équipe de basketball à 31-32 ans, donc je me disais que quelque chose n’allait pas marcher à un moment, explique-t-il.
L’histoire prend une autre dimension lorsqu’on découvre que le basket fait partie de son patrimoine familial. Le grand-père de Léo, Jean-Yves Courtin, est l’un des cofondateurs de Cholet Basket, un des clubs les plus titrés de France, qui a récemment célébré son 50e anniversaire.
Véritable usine à talents, Cholet est un club historique d’une petite ville qui a vu passer plusieurs joueurs de calibre de la NBA, dont le multiple joueur défensif de l’année Rudy Gobert. Ce modèle de développement inspire profondément Léo Bouisson, qui entend bien poursuivre, et réinventer, le chemin tracé autrefois par son grand-père.

Jean-Yves Courtin (au centre, en blanc) lors de la fondation du club Cholet Basket, il y a 50 ans.
Photo : Courtoisie de Cholet Basket
C’est donc dans un univers où le ballon orange est roi que le jeune entrepreneur a grandi, baigné dans la culture du sport sans jamais prétendre y faire carrière comme joueur. Une passion transmise de génération en génération.
Toute ma famille a joué au basket, aucun à haut niveau, mais on a toujours été des grands passionnés. Mes frères et moi, on se réveillait tout le temps à deux heures du matin pour regarder le match des étoiles, pour voir le concours de dunk, de trois points, etc.
Six mois, trois têtes, un élan
Quand Léo Bouisson s’est joint à l’Alliance de Montréal comme copropriétaire, il n’a pas seulement investi dans une franchise. Il s’est greffé à un trio aux profils complémentaires, formé de Joel Anthony et Ian-Philip Paul-Hus. Une structure collégiale inusitée dans le sport professionnel, mais qui s’est rapidement imposée comme un point fort.
On a tous les trois une grande passion pour le basket. Mais la passion, ça a été l'étincelle du début. La base solide du business, c’est ce qui va alimenter le feu, explique Léo.
Et on se complète. Déjà, Joel a une incroyable crédibilité basket, il a des standards NBA.
Cette crédibilité n’a rien d’abstrait. Ancien joueur de la NBA, Joel Anthony a disputé dix saisons au plus haut niveau, remportant deux championnats avec le Heat de Miami. Il est aussi l’un des visages marquants du basketball canadien.
Dès la première saison de l’Alliance, en 2022, il en est devenu le directeur général, avant de faire le saut vers la copropriété deux ans plus tard. Bien avant qu’ils ne deviennent partenaires, Bouisson avait déjà tendu le micro à Anthony : il l’avait reçu comme tout premier invité de son balado Unfiltered Athlete, une série d’entretiens où il explore le parcours d’athlètes issus de disciplines variées.

Joel Anthony (au centre) rigole avec LeBron James (à gauche) et Ray Allen (à droite).
Photo : Associated Press / Wilfredo Lee
Et sur le terrain, son influence est tangible. Grâce à son réseau et à sa réputation, Anthony a permis à l’organisation de frapper deux grands coups en début d’année : l’embauche de Jermaine Small, entraîneur-chef le plus victorieux de l’histoire de la LECB, et la signature de Quincy Guerrier, joueur montréalais du club-école des Raptors de Toronto dans la G-League, les Raptors 905.
Quand on a signé Jermaine Small pour deux ans, le coach le plus victorieux de l’histoire de la LECB et ses deux titres avec Edmonton, on peut le faire parce que Joel connaît l’écosystème, il a des relations et des gens qui lui font confiance. On a eu Quincy Guerrier qui a signé aussi, un gros talent québécois, ça se fait grâce à la crédibilité qu’a Joel dans le monde du basket.
Si Anthony incarne la vision basket, Ian-Philip Paul-Hus représente l’œil du partisan. Dès les débuts de la franchise, il faisait partie des tout premiers détenteurs d’un abonnement de saison. C’est cette sensibilité au vécu des spectateurs qui guide son apport dans la gouvernance du club. Pour lui, chaque détail de l’expérience fan compte.
Ian-Philippe, lui, a un point de vue partisan extrêmement fort, parce que c’est un des premiers détenteurs de billets de saison de l’histoire du club. Le système de son par exemple, c’était son idée, c’est lui qui a poussé pour qu’on le change ASAP.
L’ancien système de son de l’Auditorium de Verdun, jugé dépassé, nuisait à l’immersion des spectateurs. Sous l’impulsion de Paul-Hus, l’Alliance a investi dans une nouvelle installation JBL, semblable à celles utilisées dans plusieurs amphithéâtres de la NBA. Une amélioration technique, certes, mais aussi symbolique : elle incarne la volonté du trio de professionnaliser chaque aspect de l’offre.
Quand tu vas à un match de basket, tes sens vont être activés, ce sont la vue, l'ouïe, puis évidemment le goût si tu prends ta bière et ton hot-dog à l’arrivée !, ajoute-t-il en plaisantant.
Et puis, il y a Bouisson, représentant de l’équipe au conseil des gouverneurs de la LECB, et porteur d’un ADN entrepreneurial affirmé.
Moi, j’apporte un côté business, start-up, de prendre quelque chose de petit, qui vivote, et le faire passer à quelque chose de supérieur assez rapidement.
Donc rapidement, avec cette entente-là, on s’est rendu compte des forces et des faiblesses de chacun, et on a réalisé qu’on se complétait bien.
Malgré leur énergie commune, les trois associés savaient que les premiers mois de leur mandat seraient limités dans leur portée. Pas de grandes révolutions — mais plutôt plusieurs micro-ajustements.
On est partis de zéro. Je n’avais pas vraiment l’expertise ni un nom dans le domaine du sport. C’était juste un projet qui me tenait à cœur explique le co-fondateur de Weeve.
Dans les six premiers mois, il n’y avait pas vraiment de gros changements qu’on pouvait faire. Mais on a fait plein de petits changements.
Mais pour véritablement marquer les esprits, il fallait un geste fort. Un projet concret qui enverrait un message : l’Alliance entre dans une nouvelle ère. C’est ainsi qu’est née l’idée d’organiser un match à ciel ouvert. Un pari inédit, audacieux, et historique.
Une vision à la taille de l’ambition
Pour Léo Bouisson et ses deux partenaires, l’ambition ne se limite pas à l’amélioration de l’existant. Dès le départ, leur volonté était de donner à l’Alliance une envergure nouvelle. Et pour y parvenir, il fallait frapper un grand coup.
On voulait avoir un impact immédiat. Avec ça, on voulait mettre l’Alliance sur la carte du sport à Montréal.
Ce premier coup d’éclat, ce fut Éclipse : match sous les étoiles. Le 25 mai 2024, l’Alliance de Montréal a organisé la toute première rencontre professionnelle de basketball extérieur au Canada, au Stade IGA. L’événement était inédit, risqué, ambitieux. Initialement prévu deux jours plus tôt, il a dû être reporté à cause des conditions météorologiques incertaines. Mais le soir venu, plus de 9300 spectateurs se sont déplacés pour vivre une expérience unique sous les projecteurs du stade montréalais, habituellement réservé au tennis.

Le match « Éclipse » avait attiré plus de 9305 spectateurs au Stade IGA.
Photo : Courtoisie de l'Alliance de Montréal/Raphael Williams-Claudio
C’était le premier gros événement qu’on voulait mettre de l’avant pour montrer qu’on voulait faire les choses différemment, explique Léo Bouisson.
Le spectacle était à la hauteur des attentes, jusqu’à ce qu’une condensation imprévue rende le parquet glissant. Par mesure de sécurité, les officiels ont dû interrompre la rencontre à la mi-temps.
Mais qu’importe le résultat sportif, l’essentiel était ailleurs. L’Alliance venait de poser un jalon important dans son développement : oser sortir du cadre, s’adresser à un public plus large et revendiquer sa place dans l’écosystème sportif montréalais.
En effet, même si l’équipe est solidement ancrée dans le quartier de Verdun — d’où provient un partisan sur deux — la popularité de l’Alliance s’effrite dès qu’on s’éloigne de l’arrondissement sur l’île de Montréal.
De plus, pour Bouisson, développer une équipe sportive, ce n’est pas seulement remplir une salle. C’est construire une culture. Une structure qui repose sur des bases solides, des principes partagés et un sentiment d’appartenance fort. Et cette vision ne se décrète pas, elle se construit collectivement.
Ce n’est pas quelque chose que j’ai envie de faire avec Joel et Ian-Philipp, où on s’assoit à trois, et on décide en quelques heures, et on dit à tout le monde : "'hey, voici nos trois principes", explique le co-propriétaire.
J’ai envie qu’on s’assoie avec les joueurs, le personnel, et qu’on décide ensemble à quoi ces principes vont ressembler pour les dix prochaines années. Je veux capturer l’essence, ce qui se ressent vraiment dans l’organisation.
Lorsqu’il réfléchit à ce qui fait le succès d’une bonne franchise, Bouisson parle peu de victoires ou de statistiques. Il parle d’écoute, de cohérence, de relations humaines.
Une franchise gagnante, c’est une équipe qui est capable de survivre et de grossir, même quand les résultats ne sont pas là, souligne-t-il.
Une bonne franchise sportive, c’est : est-ce que t’écoutes tes fans ? Est-ce que t’écoutes tes partenaires ? Est-ce que tu comprends ce qu’ils veulent, et est-ce que ta culture interne fonctionne ? Est-ce que les gens restent, sont passionnés ?
Si tu as quelque chose de plus que cinq joueurs qui dunkent sur un court de basket, si tu as un sentiment d’appartenance, une excitation pour le basket dans la salle et dans ta ville, c’est là que ton équipe gagne au sens large.
Pour bâtir cette culture, Léo Bouisson s’inspire d’un modèle bien particulier, Cholet Basket, le club de son grand-père. Lors d’un voyage récent dans la ville française, il a redécouvert un club qu’il connaît bien — un retour aux sources. Mais cette fois, il y est allé avec un regard d’entrepreneur, à l’affût de bonnes pratiques à importer.

Léo Bouisson en visite à Cholet Basket, il y a quelques mois.
Photo : Courtoisie de Léo Bouisson
Le troisième point, qui touche surtout les partenaires, c’est 100 % inspiré de Cholet Basket. Ils ont depuis cinq, six ans ce qu’ils appellent un club affaires, raconte Bouisson.
À Cholet, ville de 60 000 habitants, plus de 300 entreprises soutiennent activement le club. Pas des géants de l’industrie, mais de petites et moyennes entreprises locales, des plombiers, des couvreurs, des commerçants. Tous unis par une passion commune pour le basketball.
Les montants d’investissement de chacune de ces commandites ne sont pas forcément gigantesques. Mais ce sont des entreprises locales, peut-être un plombier, quelqu’un qui installe des toits, ou peu importe, mais qui ont cette passion pour le basketball, explique-t-il.
Et dans un monde où être un partenaire d’une équipe sportive coûte cher, eux ils se sont dit : on veut attirer des plus petits commandites de deux à 20 employés, mais des gens qui sont fans.
L’idée, c’est de tisser un réseau social autour du club, au-delà des logiques strictement financières. Les partenaires se retrouvent même en dehors de la saison, lors d’événements conviviaux organisés dans des brasseries locales ou autour de thématiques précises. Le basket devient un prétexte à la rencontre.
L’idée, c’est d’avoir ce lien de l’équipe aux partenaires, non seulement durant la saison, mais aussi en dehors de la saison. […] Les partenaires qui viennent savent que la glue qui les lie entre eux, c’est le basket. C’est une manière d’établir une relation qui n’est pas juste transactionnelle, ajoute Bouisson.
Je veux pouvoir dire à nos commandites : rentrer dans ce club-là, c’est vraiment marginal le montant pour faire partie de ce groupe de réseautage. Et sans avoir un gros engagement, vous allez pouvoir vous rapprocher de nos partenaires, pouvoir jouer des matchs de l’Alliance.
C’est une façon de créer un tout petit lien, puis sur le temps le faire évoluer.
Même si la plupart des changements mis en place par la nouvelle direction se sont faits en coulisses, le vent de fraîcheur insufflé par le trio de propriétaires se fait déjà sentir sur le terrain aussi.
Jeudi dernier, après 12 matchs disputés en saison régulière de la LECB, l’Alliance affichait un dossier de 6 victoires et 6 défaites, égalant déjà le record de gains de la franchise depuis sa création en 2021.
Elle tentera de battre ce record ce dimanche, à domicile, devant ses partisans, face aux River Lions de Niagara. Un moment qui confirmerait que le travail accompli commence réellement à porter ses fruits.
L’équipe se trouve dans une bonne position pour participer aux séries éliminatoires cette année, et devrait finir, pour la première fois depuis sa fondation, au-dessus du dernier rang de sa conférence.
Si l’Alliance de Montréal souhaite s’imposer dans l’écosystème sportif de la métropole, elle devra rivaliser avec des institutions bien ancrées comme le Canadien, les Alouettes ou le CF Montréal. Et pour y parvenir, les résultats sur le parquet comptent tout autant que le rayonnement hors terrain.
Un objectif que Léo Bouisson et ses partenaires ne prennent pas à la légère :
On veut créer une culture de champion, sur le terrain comme en dehors.