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Orgo-Life the new way to the future Advertising by AdpathwayLe week-end dernier, après une bonne vingtaine d’années de débats sur la question, Hockey Québec a annoncé à ses membres un important remaniement de sa pyramide de développement des joueurs d’élite. Que faut-il en penser?
Avant d’analyser les plans d’avenir de la fédération, prenons un instant pour comprendre la situation actuelle du côté masculin.
Depuis 25 ans, le nombre de hockeyeurs québécois occupant des postes à temps complet dans la LNH diminue constamment. Et les joueurs provenant du Québec ne parviennent presque plus à percer les formations des équipes nationales. Dans quelques mois, aux Jeux de Milan-Cortina, il n’y aura probablement aucun Québécois au sein de l’équipe masculine de hockey.
Le bassin de hockeyeurs québécois (ils étaient 89 000 la saison dernière) est pourtant plus imposant que ceux de la Finlande (66 000) et de la Suède (77 000). Il est aussi équivalent à celui de la Russie, qui se situe autour de 90 000 joueurs.
Jusqu’à la fin des années 1990, la LHJMQ et la Ligue midget AAA étaient deux des plus foisonnantes pépinières de talents sur la planète. La LHJMQ comptait alors 10 équipes et la Ligue midget AAA n’en comptait que 7. Mais pour des raisons d’affaires, et pour imiter les Ligues junior de l’Ontario de l’Ouest, la LHJMQ s’est alors mise à procéder à des expansions.
Depuis le début des années 2000, la LHJMQ est composée de 18 équipes. Après ce mouvement expansionniste, le bassin de joueurs membres de Hockey Québec s’est mis à diminuer.
Encore aujourd’hui, même en tenant compte des membres provenant des fédérations de hockey des Maritimes, la LHJMQ puise ses talents dans un bassin de joueurs de 23 % à 30 % moins profond que les deux autres ligues junior majeur canadiennes. Ce n’est pas anodin.
Comme le démontre le tableau suivant, ce problème a été accentué par le fait que pour suivre la cadence expansionniste du hockey junior, Hockey Québec a plus que doublé le nombre d’équipes midget AAA (maintenant appelées M18 AAA). Cette expérience a toutefois clairement démontré qu’au lieu de développer un plus grand nombre de hockeyeurs de niveau mondial, le Québec s’est mis à en développer moins.
En fait, malgré la présence de 15 équipes dans la Ligue M18 AAA, on retrouve à peu près le même nombre de joueurs québécois dans la LHJMQ qu’à l’époque où il y en avait sept.
Les équipes de la Ligue M18 AAA ont pour mission de développer la crème de la crème des talents québécois. Mais cette réforme, combinée à la diminution du nombre de hockeyeurs, fait en sorte que chacune des 15 équipes existantes puise dans des bassins nettement plus petits :
Note: Le Québec n’a jamais développé autant de joueurs professionnels qu’à l’époque où la Ligue M18 AAA regroupait les meilleurs talents au sein de seulement 7 équipes. L’accroissement du nombre d’équipes M18 AAA et une constante diminution des bassins de joueurs M13 ont eu des effets jusque dans la LNH.
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Outre ces dommageables expansions, la société québécoise et les façons de développer des athlètes de calibre mondial ont aussi beaucoup changé au cours des 20 dernières années.
Par exemple, au Québec, de plus en plus de parents en sont venus à la conclusion que le monopole du hockey associatif ne convenait pas à leur famille. Nombreux étaient ceux qui refusaient, par exemple, que Hockey Québec leur impose le choix de l’école qu’allait fréquenter leur enfant. D’autres souhaitaient simplement choisir l’environnement sportif qui leur convenait le mieux.
Ce mouvement est devenu une lutte qui a éventuellement donné lieu au développement d’un vaste réseau de hockey scolaire.

Le directeur général de Hockey Québec, Stéphane Auger
Photo : La Presse canadienne / Ryan Remiorz
En coulisses, des décideurs du monde du hockey identifient l’avènement du hockey scolaire comme l’une des principales tares du hockey québécois. Ils soutiennent que ce phénomène a eu pour effet de répartir les joueurs au sein de deux réseaux distincts et donc de diluer le talent au sein du hockey mineur. Le déclin de notre hockey avait pourtant commencé bien avant l’arrivée en force du hockey scolaire.
Et plus récemment, on a vu un autre courant se développer. Un nombre grandissant de familles délaissent les programmes d’excellence de HQ au profit de programmes situés en Ontario ou aux États-Unis.
Pendant ce temps, dans toutes sortes de disciplines et dans plusieurs pays, de plus en plus de fédérations sportives ont commencé à créer des programmes nationaux permanents (ou des équipes nationales) pour maximiser le développement de leurs meilleurs jeunes talents. C’est notamment ce que font USA Hockey, Tennis Canada et Natation Canada.
Parce que le but consiste à développer des athlètes de niveau mondial, ces programmes ont pour objectif d’exposer leurs jeunes talents à des compétitions internationales.
Au Québec, il faut toutefois percer la formation d’Équipe Canada pour compétitionner au niveau international. Et ça arrive de moins en moins.
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Parlons maintenant des nouvelles orientations de Hockey Québec.
Pour tenter de redonner un élan à sa structure de développement, Hockey Québec a annoncé la semaine dernière la création de deux ligues d’excellence qui compteront une douzaine d’équipes chacune. Ces deux ligues regrouperont les 200 joueurs de 14 ans et les 200 joueurs de 15 ans jugés les plus prometteurs de leur groupe d’âge.
Les joueurs de ces nouvelles équipes seront sélectionnés par la fédération et fréquenteront des programmes sports-études choisis par la fédération.
Première réaction : l’approche de HQ est étonnante parce que les structures de développement sont normalement pyramidales. C’est-à-dire qu’elles partent d’une base très large qui s’amenuise au fil des ans (et au fil des paliers de développement) jusqu’à ce qu’on parvienne par rassembler la très fine élite au sommet.
En lieu et place, HQ décide plutôt de créer une étroite structure cylindrique qui rassemblera seulement 200 talents à l’âge de 14 ans, 200 talents à l’âge de 15 ans et 200 talents à l’âge de 16 ans, puisque les cadres de la Ligue M18 AAA sera réduite de 15 à 12 équipes (j’y reviendrai plus loin).
Par ailleurs, comme les équipes de ces deux nouvelles ligues seront concentrées dans le corridor Gatineau-Lévis, comme l’a affirmé le directeur général de Hockey Québec, il faut se demander s’il est normal ou acceptable de demander aux enfants provenant des régions éloignées de quitter leur domicile familial aussi tôt qu’à 14 ans pour jouer au hockey.
Quelles valeurs priorise-t-on exactement? Pour plusieurs familles, ce sera sans doute inacceptable.
Cette nouvelle orientation est aussi controversée parce que le hockey est un sport à développement tardif au sein duquel les athlètes atteignent leur apogée vers l’âge de 24 ans. En conséquence, plus on identifie l’élite en bas âge, plus on risque de se tromper.
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À titre d’exemple, 41 Québécois ont disputé au moins un match dans la LNH cette saison. Et parmi ces 41 joueurs, 9 n’ont pas été choisis au repêchage de la LNH et deux autres ont été sélectionnés un ou deux ans après leur année normale de repêchage.
Ça signifie que lorsque ces 41 joueurs avaient 18 ans, les experts en recrutement de 32 équipes professionnelles ont été incapables de prédire la trajectoire de développement de 27 % d’entre eux.
Par ailleurs, 32 des 41 Québécois qui ont joué dans la LNH cette saison ont transité par la LHJMQ pour parfaire leur développement. Ça signifie qu’avant de jouer au niveau junior majeur, ces 32 joueurs ont été admissibles au repêchage de la LHJMQ à l’âge de 15 ans.
Il est donc fascinant de constater qu’il y a dans la LNH un plus grand nombre de Québécois (12) qui ont été repêchés entre le 73e et le 207e rang par leur équipe junior (ou qui n’ont pas été repêchés du tout) que de joueurs (11) qui ont été repêchés parmi les cinq premiers et qui étaient considérés comme les joueurs les plus talentueux de leur groupe d’âge!
En commençant à identifier sa fine élite dès l’âge de 14 ans, HQ commettra donc énormément d’erreurs de recrutement.

Des chandails d'Équipe Québec
Photo : Hockey Québec
La seule façon d’amoindrir la marge d’erreur serait de rendre le système particulièrement agile en surveillant constamment les joueurs qui évolueront en marge de ces deux ligues de 200 joueurs. Un peu comme le font les Finlandais, on pourrait ainsi constamment faire graduer ou rétrograder des joueurs selon leur progression ou leur stagnation.
Au Québec par contre, ce n’est pas dans notre culture de faciliter ce genre d’ajustements et de saine compétition à l’interne.
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Malgré ce qui précède, l’un des aspects les plus intéressants de cette refonte du système résidera dans le fait que les joueurs seront sélectionnés par la fédération plutôt que par leur organisation régionale. Sans oublier le fait que les 200 joueurs de 14 ans et les 200 joueurs de 15 ans seront entraînés dans une perspective de développement à plus long terme plutôt qu’avec une intention de remporter le plus de matchs possible dans une saison de sept mois.
Cela permettra aux sélectionneurs de HQ de choisir leurs candidats différemment.
À titre d’exemple, seulement 3 des 146 défenseurs (2 %) sélectionnés aux deux derniers repêchages de la LNH mesuraient moins de 6 pieds. Or, selon Elite Prospect, 56 % des défenseurs qui jouent dans la Ligue M18 AAA cette saison mesurent 5 pi 11 po et moins. Plus de la moitié des équipes de la ligue comptent 4 défenseurs sur 6 (ou plus) qui mesurent moins de 6 pieds.
Si plus de la moitié du bassin d’espoirs est rejeté avant de poser un pied sur la ligne de départ, ça va très mal. Tant les recruteurs de la LNH que les dirigeants du hockey québécois soulignent souvent cet état de fait.
En accordant davantage d’attention aux joueurs de plus grande taille, dont la motricité et la coordination sont souvent moins à point au début de l’adolescence, les chances de développer davantage d’athlètes de niveau mondial seront sans doute plus élevées.
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Hockey Québec a par ailleurs annoncé que trois équipes de la Ligue M18 AAA seront abolies. D’ici trois ans, le réseau de développement québécois le plus névralgique sera donc ramené de 15 à 12 équipes.
Comme le démontrait le tableau apparaissant au début de ce texte, la réduction du nombre d’équipes M18 AAA est un pas dans le bonne direction. Mais est-ce suffisant? Pour recréer les bassins compétitifs d’antan, il faudrait abolir plus de la moitié des équipes actuelles.
L’autre gigantesque nouvelle concernant la Ligue M18 AAA, c’est qu’elle redeviendra une ligue de joueurs de 16 ans comme elle l’était essentiellement à ses années les plus fastes. Depuis les expansions du début des années 2000, cette ligue était graduellement devenue un indescriptible méli-mélo de joueurs de 15 ans, 16 ans et 17 ans.
Quelques statistiques importantes sur la Ligue M18 AAA :
Les 41 Québécois qui ont joué dans la LNH cette saison ont emprunté pas moins de 15 trajectoires différentes entre l’âge de 15 et 17 ans avant de parvenir à se hisser jusqu’au sommet du hockey.
Le plus grand dénominateur commun entre ces 41 joueurs : 36 (87,8%) ont joué dans la Ligue M18 AAA, comparativement à 32 qui ont joué dans la LHJMQ (78%).
Au total, 56 % des Québécois qui ont joué dans la LNH cette saison ne jouaient pas dans la LHJMQ à l’âge de 16 ans. Il y a 6 ans, 69 % des Québécois évoluant dans la LNH n’avaient pas joué dans la LHJMQ à 16 ans. Mais devinez quoi? Les équipes de la LHJMQ et les agents continuent d’insister pour faire graduer leurs meilleurs espoirs au niveau junior majeur à 16 ans et à faire abstraction de l’importance de la « compétition significative » dans cette période charnière de leur développement.
Dans la même veine, sur les 13 défenseurs québécois de la LNH, 9 (69 %) ne jouaient pas dans la LHJMQ à l’âge de 16 ans. (Une parenthèse ici pour souligner que 2 de ces 13 défenseurs (15,4 %), Vincent Desharnais et Jonathan Aspirot, ont joué au sein du programme scolaire Ulysse, de Terrebonne, à l’âge de 16 ans. C’est une performance remarquable pour un programme indépendant évoluant en marge du réseau d’excellence de HQ.)
Au bout du compte, ces chiffres signifient que HQ doit déployer tous les efforts imaginables pour faire en sorte que la Ligue M18 AAA redevienne l’une des ligues midget les plus compétitives au monde. Et que les acteurs du hockey québécois doivent coopérer pour limiter le plus possible l’accession des joueurs de 16 ans à la LHJMQ.
Plusieurs des mesures annoncées par HQ visent à rendre la Ligue M18 AAA plus compétitive et c’est très positif. Mais on pourrait aller plus loin en réduisant davantage le nombre d’équipes et, ne l’oublions pas, en trouvant le moyen d’au moins exposer une équipe québécoise à de la compétition internationale à l’âge de 16 ans.
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Si vous le permettez, terminons avec la question qui tue.
Et la LHJMQ dans tout ça? Que compte-t-elle faire pour améliorer ses programmes et retrouver sa pertinence d’antan?
On se retrouve un peu dans la même situation qu’il y a trois ans lors de la publication du rapport du comité présidé par Marc Denis.
Le rapport proposait des dizaines et des dizaines de changements au hockey mineur québécois, mais ne suggérait que des modifications cosmétiques à la LHJMQ, comme si elle ne faisait pas partie de la solution (ou du problème).
Or, même si les dirigeants et les acteurs de la LHJMQ déploient tous les efforts possibles pour améliorer l’encadrement offert à leurs joueurs, ils restent confrontés au même problème fondamental que la Ligue M18 AAA : leur nombre d’équipes est beaucoup trop élevé pour le bassin de joueurs dans lequel ils s’alimentent.
Les expansions survenues il y a 25 ans sont comme une plaie qui n’a jamais guéri. Elles ont fait extrêmement mal au hockey québécois et elles continuent de le faire.
Dans la Ligue M18 AAA, le nombre d’équipes sera réduit parce que la fédération l’imposera. Mais dans la LHJMQ, qui est une entreprise commerciale, personne n’acceptera jamais de saborder sa concession. Et même si jamais quelqu’un acceptait, la ligue devrait débourser quelques millions pour racheter la concession avant de l’abolir.
Aussi bien dire que ça n’arrivera jamais.


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