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Orgo-Life the new way to the future Advertising by AdpathwayQuel est le plus grand événement sportif qu'une ville puisse accueillir? Si vous avez répondu « les Jeux olympiques d’été », vous avez droit à deux étoiles dans votre cahier.
La France a sursauté lundi quand le quotidien Le Parisien a rapporté que la Cour des comptes – l’équivalent du Vérificateur général au Canada – évalue à 6 milliards d’euros les dépenses publiques engendrées par la présentation des Jeux de Paris, l’été dernier. Six milliards d’euros équivalent à 9,5 milliards de dollars canadiens.
Si l’on tient compte du fait que le budget du comité organisateur (4,4 milliards d’euros) a dégagé un léger surplus (12 millions de billets ont été vendus pendant les Jeux) et qu’environ 2,2 milliards d’euros ont été amassés en contributions privées pour aider à financer Paris 2024, une facture publique de 6 milliards d’euros ne semble pas disproportionnée par rapport à celle des Jeux d’été précédents.
À titre d’exemple, les Jeux de Tokyo, présentés en 2021 en pleine pandémie et devant des gradins vides, ont coûté un peu plus de 19 milliards de dollars à organiser. Et en 2016, ceux de Rio avaient coûté, tenez-vous bien, 25,5 milliards!
Le comité organisateur de Paris conteste vigoureusement l’évaluation de la Cour des comptes. Il reproche aux vérificateurs français d’attribuer certaines dépenses entièrement aux Jeux (comme la sécurité), ce qui est de bonne guerre.
C’est toutefois un autre aspect de l’argumentaire du comité organisateur qui a retenu mon attention. Il a aussi reproché à la Cour des comptes de ne pas tenir compte (sans jeu de mots) des retombées économiques de 14,3 milliards de dollars promises par plusieurs études avant la présentation des Jeux.
Ah, les fameuses retombées économiques!
Si tout le monde les tenait pour acquises, et si tout le monde cessait de se fier aux comptables, présenter un grand événement sportif ou construire un stade aux frais des contribuables équivaudrait à chaque coup à faire l’élevage de poules aux œufs d’or.
Je me permets ici un petit détour par Vancouver, où le maire Ken Sim et le ministre provincial du Tourisme, Spencer Chandra Herbert, ont publié mardi une déclaration commune annonçant ni plus ni moins que des camions remplis d’argent s’apprêtent à franchir les frontières de la Colombie-Britannique.
Tout cet argent se mettra à pleuvoir en raison de la présentation de sept matchs de la Coupe du monde de soccer à Vancouver, l’été prochain. Selon le maire et le ministre, plus de 18 000 emplois pourraient être générés entre 2026 et 2031 tellement les effets de la présentation de ces sept matchs seront durables. Et tout cela sans tenir compte des dépenses de plus de 1 milliard que feront les touristes (entre 2026 et 2031), qui auront soudainement eu envie de passer par Vancouver parce qu’on y aura un jour présenté sept matchs de foot.
Ah, les fameuses retombées économiques!
Les coûts de présentation de ces sept matchs ont doublé depuis que le Canada a posé sa candidature pour accueillir le Mondial aux côtés des États-Unis et du Mexique. Les évaluations se situent entre 483 et 581 millions, soit autour de 83 millions par match. Mais on peut facilement parier que la note finale sera plus costaude.
À Toronto, la facture des six matchs de la Coupe du monde à être disputés au BMO Field a aussi explosé jusqu’à 380 millions. Et la mairesse Olivia Chow a révélé, il y a un mois, qu’elle faisait désormais face à une facture imprévue de 40 millions supplémentaires.
On peut déjà tenir pour acquis que le Canada dépensera plus de 1 milliard pour présenter 13 matchs de foot. En comparaison, les Jeux de Paris, au cours desquels 10 500 athlètes ont participé à 47 disciplines devant 12 millions de spectateurs sur une période de 17 jours, ressemblent presque à une aubaine avec leur facture de 9,5 milliards de dollars.
Tout cela nous ramène à notre question de départ : quel est le plus gros événement sportif qu’une ville puisse accueillir?
Les promoteurs brandissent souvent des études annonçant d’importantes retombées économiques pour justifier leurs demandes de participation financière des gouvernements. Et la majorité des retombées promises s’expliquent par les importantes quantités d’argent neuf que des touristes venus de l’extérieur sont censés injecter dans l’économie locale.
Si l’on suit cette logique, la présentation des Jeux olympiques devrait donc générer des retombées économiques gigantesques en comparaison, par exemple, à la présentation d’un Grand Prix de F1 ou de 13 matchs de soccer.
Or, plusieurs études soutiennent qu’il est même hasardeux d’affirmer que la présentation des Jeux – le plus gros événement sportif de la planète – ait un effet notable sur l’industrie touristique d’une grande ville.
En 2013, les chercheurs qui ont réalisé l’une de ces études1 ont eu la bonne idée de décortiquer les données du trafic aérien des aéroports des six villes ayant présenté les Jeux olympiques d’été et d’hiver de 1996 à 2010. Leur démarche était d’une logique implacable puisque si les Jeux provoquent une hausse notable du tourisme international, on devrait forcément accueillir un plus grand nombre de passagers à l’aéroport.
Or, cette étude a révélé qu’à court terme, les Jeux d’Atlanta (été 1996), de Londres (été 2012) et de Salt Lake City (hiver 2002) n’avaient généré aucune hausse notable de fréquentation de leur aéroport international. En revanche, les aéroports de Sydney (été 2000), Turin (hiver 2006) et Vancouver (hiver 2010) avaient été nettement plus fréquentés avant et pendant les Jeux.
Donc, l'effet est mitigé à court terme.
À plus long terme, par contre, il n’y a pas eu d’effet. Dans les années suivant la présentation des Jeux, la circulation aérienne et le nombre de visiteurs sont redevenus normaux dans cinq des six villes olympiques. Seul l’aéroport de Salt Lake City, une ville d’à peine 200 000 habitants, a enregistré une hausse de visiteurs. Et cet effet a commencé à se faire sentir environ huit mois après la présentation des Jeux de 2002.
Pour le comité organisateur des Jeux de Paris, ça soulève la question suivante : si l’on tient compte du fait que Paris était déjà la ville la plus visitée de la planète avant l’été 2024, d’où viendront les 9 milliards de retombées économiques annoncées?
Et pour le maire de Vancouver et le ministre du Tourisme de la Colombie-Britannique, la question à poser est la suivante : si les Jeux olympiques n’ont presque pas d’effet sur le tourisme, que pensez-vous accomplir avec vos 7 matchs de foot à 581 millions?
1 : Moss, Steven E., Kathleen H. Gruben, Janet Moss. 2013. International Tourism and the Olympics : The Legacy Effect. Department of Logistics & Supply Chain Management Faculty Presentations, Georgia Southern University.